Économie de la connaissance
Turgo Bastien |
Idriss Aberkane, détenteur de trois doctorats
avant la trentaine, pour évoquer l’économie de la connaissance, établi la différence
entre Bagdad avant la découverte du pétrole et Bagdad possédant l’or noir. Bagdad
était, d’après lui, la Silicon Valley du monde, et était beaucoup plus riche, puissant
et influent qu’il l’est avec le pétrole. Il s’adonnait à l’économie de la
connaissance et non l’économie des matières premières.
Avant la découverte du pétrole, Bagdad
ne creusait pas le sol mais scrutait le ciel. Il était la capitale de l’astronomie et
des mathématiques. A Bagdad ont pris naissance les expressions telles :
algorithme, l’algèbre, l’alcool, l’x des équations...
Les GAFAA (Google, Apple, Facebook, Amazon,
Alibaba), sont des entreprises jeunes et les plus riches du monde. Le prix d’une
tablette IPad n’est pas la résultante de l’ensemble de ses composantes ni des matières
premières utilisées pour la fabrication de ces dernières, mais de la somme
de connaissance, d’innovation et aussi de l’effort de marketing, de branding
(Valorisation de la marque) qui est matérialisée dans le produit. Ces entreprises évoluent dans l’économie
de la connaissance, elles sont des entreprises de connaissance et du savoir. Elles vendent ou utilisent de la connaissance, des données et de l’information.
Facebook, entreprise créée en 2004, d’après
Aberkane vaut plus ou est plus riche que Total (pétrolier), Vivendi (Media), l’Oréal
(Cosmétique), Airbus (Avion), LVMH (Luxe), Axa (Assurance) réunis. Facebook vent
des données. Les données ont beaucoup plus de valeur que le pétrole.
Aujourd’hui, sont puissants,
influents et certainement riches ceux qui possèdent et utilisent la
connaissance, les données et les informations. La connaissance vient de la
formation, de la lecture, de l’expérience, de la recherche, de la production
scientifique, de la réflexion, du débat, de l’observation de nature… Les données sont fournies souvent gratuites par la multitude qui utilise des plateformes (Google, Facebook, YouTube...), ou sont collectées à notre insu à des fins commerciales.
Pour connaitre la valeur d’une
entreprise, il faut se référer à son budget de formation et de recherche et aussi à sa capacité de collecter, de traiter un grand nombre de données.
Combien le budget de formation et de recherche représente-t-il du chiffre d’affaires
de l’entreprise ? L’entreprise, a-t-elle une équipe VIP (Value Innovation
Progam) ?
Les données collectées et traitées
pour produire de l’information représentent la plus grande ressource d’une
entreprise. Facebook et Google ne
vendent pas des matières premières mais des données.
Dans ma caisse populaire, en tant que marketeur, je
lance un nouveau produit. Je charge à l’un de mes soldats qui porte le grade d’officier d’aller promouvoir ma
caisse et son nouveau produit sur la place du Champ de Mars. La première
personne contactée n’est pas intéressée à l’écouter, la deuxième, non plus… Il
a passé plus d’une heure avant d’obtenir son premier entretien. L’interlocuteur
l’a écouté avec intérêt. Et à la fin, il lui dit, pourrais-tu me donner
quelques sous pour payer un taxi… Quelle déception (Si vous riez la leçon est
apprise !).
Cette histoire me fait penser à un récit
de Robert Kiyosaki sur deux stratégies différentes pour alimenter un village en
eau potable. Deux entrepreneurs ont décroché simultanément un contrat pour
alimenter un village en eau. Sitôt le contrat signé, l’entrepreneur 1 acheta
deux sceaux pour transporter de l’eau et remplir les citernes du village.
Pendant ce temps on n’a pas les
nouvelles de l’entrepreneur 2 qui s’était retiré dans ses bureaux avec des ingénieurs
pour réaliser des plans, des financiers pour construire des scenarios financiers et des gestionnaires pour bâtir une entreprise. Il a
construit un pipeline pour amener l’eau de la source aux réservoirs du village.
Imaginez la différence et la suite de l’histoire. Il est devenu riche, et avec les mêmes plans, il a construit des entreprises similaires pour d'autres village.
Souvent au lieu de construire un
pipeline, nous transportons de l’eau dans un seau d’eau. Dans certains cas on l’amène
dans un panier en osier ou en bambou.
Pour revenir à la technologie, à l’utilisation
des données, il me
suffirait de construire ou faire construire une base de données, de traiter les données et d’utiliser les informations qui en découlent pour connaitre les
clients, concevoir des produits et des services adaptées à la satisfaction de
leur besoins et désirs.
Au lieu d’envoyer mon officier de
marketing sur la place public pour procéder
à la méthodologie des témoins de Jéhovah qui consiste à apporter la parole, la
bonne parole à tous les passants, j’aurais dû réaliser une liste de diffusion
sur WhatsApp avec un millier voir cinq milliers de prospects ou plus, tirés de ma
base de données et leur offrir mon nouveau produit. En quelques secondes, j’atteindrais
un nombre impressionnant de clients, je serai gagnant même avec un faible taux d’adhésion.
On est libre de choisir entre scruter
le ciel ou creuser les profondeurs de la terre. Entre l’économie de la
connaissance et l’économie des matières premières. Entre l’économie de seau d’eau
et l’économie de pipeline.
L’économie de la connaissance est une économie
où les ressources sont infinies ou illimitées, où un plus un font trois, où tout le monde est
né avec du pouvoir d’achat, où le chômeur a plus de pouvoir d’achat que le salarié,
une économie qui maximise le pouvoir d’achat des amoureux (I. Aberkane).
Les matières premières (l’or, le pétrole,
la nourriture, …) sont limitées alors que l’économie de la connaissance est immatérielle
et infinie : les livres, les peintures, les logiciels, la biologie, les mathématiques
...
La Corée du Sud exporte plus que la
Russie qui possède un territoire beaucoup plus vaste et riche de matières premières
de toutes sortes. La Corée du Sud possédait un ministère de l’économie de la
connaissance qui est devenu simplement le ministère de l’économie. Elle exporte
des disques durs, des téléphones, des logiciels, des pièces autos, de la robotique… : des biens qui utilisent plus de connaissance que de la matière première.
Les échanges de savoir sont à somme
positive. Si on partage un bien matériel (un pain) on le divise, si on partage
un bien immatériel (un livre, non le papier, mais l’écriture, une technique,
une théorie…) on le multiple. La connaissance est prolifique, se reproduit, se
multiplie.
Une toile de Turgo Bastien |
Pour acquérir de la connaissance, il
nous faut de l’attention ou de l’amour et du temps. Le pouvoir d’achat de la
connaissance est l'AT (Attention multipliée par le temps). Tout le monde est né avec de l’attention
et du temps, donc du pouvoir d’achat. Pour Idriss Aberkane, le chômeur a plus de
pouvoir d’achat (de temps et d’attention) que le travailleur. Il a plus de
temps libre pour apprendre, pour produire et partager de la connaissance.
Quand on est amoureux on maxime le
pouvoir d’achat, le temps et l’attention. Quand on s’adonne à ce qu’on
aime, on le fait avec passion et on est productif. Messi est un passionné du football. Il y a consacré
beaucoup de temps et d’attention. Tous les passionnés du football ne deviendront
pas des Messi, mais tous les Messi sont forcément des passionnés.
Pour la nouvelle Haïti, je vous
invite à opter pour l’économie de la connaissance et du savoir. Je vous implore de scruter le ciel et non creuser le sol, à considérer l’arbre comme un patrimoine,
comme un livre, un producteur d’oxygène, une pharmacie et non comme une
source d’énergie…
Peinture de Turgo Bastien |
Nonais Derisier,
10 Juin 2019